Éviter les généralisations simplistes

Nous l’avons vu, les femmes issues des immigrations ont des profils qui peuvent varier énormément selon leurs appartenances sociales, leurs bagages éducatifs et culturels, leurs parcours de vie et leurs ressources. Ce constat est également valable pour les femmes venant d’un même pays, car il existe, la plupart du temps, des différences décisives entre celles qui viennent de milieux urbains, ont obtenu des diplômes et connu le travail rémunéré et celles qui n’ont pas ou peu été scolarisées et dont la marge d’autonomie s’est trouvée limitée.

De même, il convient de prendre en compte la diversité des statuts administratifs et les impacts qu’ils peuvent produire sur les parcours des femmes. Ainsi, le statut de réfugiée accorde une autonomie individuelle aux femmes qui l’obtiennent ; ce qui n’est pas le cas des femmes régularisées parce que rejoignant un époux ou leur famille. D’autres femmes comptent parmi les « sans-papiers » et vivent toutes les fragilisations liées à cette précarité administrative.

Les chemins de la migration sont parsemés de violences pour les femmes. Le vécu des femmes demandeuses d’asiles ou réfugiées peut là aussi présenter des particularités, notamment par rapport aux violences politiques subies.

Enfin, il est important de maîtriser les nuances du vocabulaire administratif. Par exemple, la dénomination « femmes primo-arrivante » peut désigner, d’un point de vue administratif, des femmes qui vivent en France depuis plusieurs années déjà.

Ne pas minimiser la singularité de la condition des femmes issues des immigrations face aux violences et discriminations

Privilégier une grille antisexiste ne doit pas faire oublier la diversité de la condition des femmes, découlant des diverses formes de domination et des différents critères de discrimination (origine sociale, nationale ou ethnique, orientation sexuelle, âge, handicap, etc.). Pour cela, il convient d’acquérir des connaissances permettant d’identifier, d’une part, la communauté des situations engendrées par les discriminations et les violences sexistes et sexuelles, et, d’autre part, les situations spécifiques aux femmes issues des immigrations face au racisme et aux discriminations. Cette démarche doit favoriser une prise de conscience de ses propres préjugés et de leurs conséquences dans la relation d’accompagnement.

Prendre en compte les besoins et les ressources des femmes immigrées

Le fait même d’immigrer témoigne de l’élan et des capacités des personnes qui s’engagent dans ce changement de vie. Que le projet migratoire soit le fait des femmes elles-mêmes ou de leurs familles, il est important que leurs besoins et leurs souhaits soient pris en compte dans l’accueil et l’accompagnement. À cet égard, il faut faire attention à ne pas associer le fait d’être une épouse ou une mère avec une situation d’inactivité professionnelle ou d’absence de projet professionnel. De même, dans l’analyse des situations-problèmes, il importe d’être attentif aux aspects relatifs aux parcours migratoires et aux besoins de ré-enracinement, afin de repérer les éléments qui peuvent fragiliser les personnes face aux discriminations ou aux violences ; parmi ces éléments, nous pouvons citer : la non-maîtrise de la langue française ; la charge psychologique liée à l’éloignement ; l’insuffisance des réseaux relationnels ; le risque d’isolement ; la déqualification découlant de la difficulté à faire reconnaître des diplômes et à faire valider des compétences.

Pour répondre à ces problématiques, il est indispensable de prendre en compte les ressources des femmes elles-mêmes. Celles-ci possèdent des expériences, des savoirs et des savoir-faire, validés ou non par des diplômes ; ces ressources constituent des atouts à investir dans l’accompagnement.

Identifier et prendre en compte les problématiques concernant les femmes issues des immigrations dans une approche intégrée de l’égalité

En 1998, le Conseil de l’Europe définit l’approche intégrée de l’égalité de cette manière : « La (ré)organisation, l’amélioration, l’évolution et l’évaluation des processus de prise de décision, aux fins d’incorporer la perspective de l’égalité entre les femmes et les hommes dans tous les domaines et à tous les niveaux par les acteurs généralement impliqués dans la mise en place des politiques ». Il s’agit donc d’une stratégie de prise en compte, dans le processus de mise œuvre des politiques et des projets, de l’égalité entre les femmes et les hommes. Ce qui demande d’intégrer cette dimension dans le processus de mise en œuvre d’une politique et d’un projet, depuis sa conception et son élaboration jusqu’à sa réalisation et son évaluation. Cette mise en œuvre d’une « approche intégrée de l’égalité » n’est possible qu’en s’appuyant sur des outils appropriés, parmi lesquels des statistiques, des observations et des méthodes d’analyse genrées.

Dans cette perspective, il est également important de prendre en compte la diversité des situations des femmes selon leurs trajectoires sociales, notamment quand ces situations croisent les parcours migratoires, y compris au regard du cumul des violences et des discriminations.